A Kinshasa, l’Afrique veut s’assumer

4 novembre 2015

A Kinshasa, l’Afrique veut s’assumer

Les  panélistes de la CEA à la conférence de presse à Kinshasa
Les panélistes de la CEA à la conférence de presse à Kinshasa

Une nouvelle dynamique ayant pour mission de gérer des statistiques économiques en Afrique est née à Kinshasa. Ainsi, l’Afrique se veut prête pour se prendre en charge, aussi dans la définition de sa stratégie de développement que dans la production des statistiques économiques.

Pour le ministre sénégalais du Plan, le PNUD et la CEA (Commission économique africaine) doivent se mettre ensemble dans l’organisation d’une réunion pour la production des statistiques en Afrique. Le développement de l’Afrique, dans un contexte de ralentissement de l’économie mondiale, passe également par là.

La 10ème Conférence économique africaine (CEA) s’est clôturée, mercredi 4 novembre à Kinshasa (RDC). Pendant trois jours, des décideurs politiques et experts, conviés par le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD) et la Banque africaine de développement (BAD), ont planché sur le thème « Lutter contre la pauvreté et les inégalités dans le Programme de développement pour l’après-2015 ».

Au cours de la conférence de presse tenue mardi dans le cadre de ces assises, on note que l’Afrique est prête à s’assumer en se choisissant librement un modèle de développement. Alors que le Fonds monétaire international (FMI) fustige, dans son dernier rapport sur les perspectives économiques en Afrique subsaharienne, « un danger dans la croissance en Afrique ».

Révolte

Ce rapport du FMI a suscité une révolte dans les rangs des conférenciers. Pour Carlos Lopes, secrétaire exécutif de la Commission économique africaine, « les analyses du FMI ne prennent pas en compte toutes les réalités africaines ». Aussi, pense-t-il, « en incluant des économies telles que celles de l’Afrique du Sud ou des pays du Maghreb, les perspectives économiques africaines sont de loin supérieures à celles projetées par le FMI ».

Abondant dans le même sens, le directeur Afrique du PNUD, Abdoulaye Mar Dieye, estime que « l’Afrique doit sortir des sentiers battus, en s’appropriant son développement ». Il croit savoir que « l’Afrique est sur la bonne voie », opposant ainsi sa foi, au pessimisme qu’affiche le FMI.

L’économiste en chef de la BAD, Steve-Kayizzi Mugerwa, partage le même point de vue. Selon lui, « il n’y a aucune raison de se lamenter face aux statistiques alarmistes du FMI ». Néanmoins, il reconnait que l’Afrique n’est pas épargnée par le ralentissement. Toutefois, « il n’y a de bonne raison de croire en un avenir radieux du continent noir », soutient-il.

Tout aussi révolté, le Sénégalais Abdoul Aziz Tall s’est montré plus direct. « Il faut, suggère-t-il, que l’Afrique se dote de structures nécessaires pour l’aider à produire ses propres statistiques ». Il est allé jusqu’à plaider autant auprès du PNUD que de la CEA de l’organisation d’une réunion sur les statistiques en Afrique pour aider les décideurs africains à « avoir des éléments d’appréciation pour un diagnostic fiable ».

Dans tous les cas, les notes statistiques du FMI ont eu l’avantage de relever les défis qui s’imposent en Afrique dans un contexte de ralentissement de l’économie mondiale.

La potion magique

Compté parmi les panélistes, le Premier ministre, Matata Ponyo, a circonscrit les grandes étapes parcourues par la RDC pour se hisser aujourd’hui parmi les économies africaines en pleine croissance. Pour le chef du gouvernement, le succès de la RDC n’a pas été le fait d’une génération spontanée.

Toute la réussite de la RDC réside dans une équation qu’il a, par ailleurs, vulgarisé lors de son dernier passage à l’Université du Ghana. Le miracle de la RDC a démontré que la lutte contre la pauvreté passe par un leadership fort couplé à la bonne gouvernance. Ainsi, pour le cas de la RDC, les performances économiques et sociales de ces cinq dernières années sont d’abord le fruit du rétablissement de la paix en RDC. « Sans la paix, croit-il, l’on ne peut pas prétendre à la croissance ».

Autant en Afrique qu’en RDC, Matata Ponyo est convaincu qu’ « un leadership fort et la bonne gouvernance sont la clé pour reculer les murs de la pauvreté ».

Par ailleurs, si la croissance en Afrique se maintient dans un contexte de ralentissement de l’économie mondiale, les panélistes sont d’avis que la survie de l’Afrique passe par la diversification de son économie.

« L’axe de diversification passe par l’industrialisation. C’est de cette manière qu’on peut parvenir à la diversification des économies africaines », a expliqué Carlos Lopes. Et Abdoulaye Mar Dieye de relativiser, « la diversification des économies africaines doit aller de pair avec l’intégration ».

Le ministre sénégalais du Plan s’est voulu plutôt pragmatique. Il a fait comprendre que les axes de diversification des économies africaines ont été tracés dans différents rapports antérieurs produits sur l’Afrique. « Aujourd’hui, ce n’est pas la diversification qui pose problème, c’est plutôt la mise en œuvre de tout ce qui a été décidé jusqu’alors », a-t-il souligné.

« Croissance sans résilience, n’est que ruine de l’économie », telle une maxime, signée Abdoulaye Mar Dieye, résumant la dynamique qui s’est créée à Kinshasa en marge de cette 10ème édition de la CEA. Cette pensée du directeur Afrique du PNUD, serait une réponse des dirigeants africains qui sont prêts à assumer pleinement leur développement, face aux perspectives économiques alarmistes du FMI.

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