RDC : procès Chebeya, un piège d’Etat ?

21 août 2015

RDC : procès Chebeya, un piège d’Etat ?

Le Prévenu Daniel Mukalay en compagnie de ses avocats
Le prévenu Daniel Mukalay en compagnie de ses avocats

Les avocats du prévenu Daniel Mukalay clament l’innocence de leur client. Ils évoquent « un piège » tendu à l’Etat congolais par « certaines officines politiciennes et des droits de l’homme ».

L’audience du procès qui se déroule en chambre foraine et qui oppose devant la Haute Cour militaire le ministère public et les parties civiles aux assassins présumés de Floribert Chebeya Bahizire et Fidèle Bazana Edadi de l’ONGDH « La Voix des Sans Voix pour les droits de l’homme (VSV) », a été consacrée aux plaidoiries de la défense, jeudi 20 août à la prison centrale de Makala.

Me Bokata Ikundaka, l’un des conseils du prévenu Daniel Mukalay, a prié la haute Cour de déclarer « non établies », en fait comme en droit, toutes les préventions mises à charge de son client.
« Si on suit la thèse, particulièrement sulfureuse du ministère public, Chebeya aurait été asphyxié sans qu’il sans qu’il se débatte. Il s’est laissé mourir sans s’agiter, sans un moindre soubresaut. C’est une impossibilité physiologique », a-t-il déclaré.

Selon lui, ce ne sont pas des abrasions et des ecchymoses qui ont tué Chebeya. Mais, « de quoi est mort Chebeya ? », se demande-t-on. Me Bokata qui dit se baser sur le rapport de l’autopsie pratiquée par les médecins légistes, estime que « les abrasions et les ecchymoses ont provoqué un stress combiné à la double pathologie dont souffrait ce défenseur des droits de l’homme ».

« Cela a provoqué une mort subite », soutient Me Bokata, affirmant que le 1er juin 2010, Chebeya et son chauffeur n’ont jamais été à l’Inspection générale de la police. « Cela, pour la simple raison que le colonel Daniel Mukalay l’en avait dissuadé à 17 h 25’, en lui faisant comprendra que le général John Numbi n’allait plus venir », explique-t-il.

L’avocat de la défense a en outre relevé les caprices de la technologie quant aux heures exactes où il y a eu des appels téléphoniques et l’envoi des SMS. Aussi, Me Bokata a mis en doute le rapport du commissaire adjoint Nkuna de la Police scientifique et technique (PTS), un sociologue qui s’est pointé sur le lieu quand la scène était déjà polluée et qui a allégué que la tête de Chebeya tournait dans tous les sens.

Un cadavre exquis

Concernant le jugement déclaratif du décès de Fidèle Bazana, Ce conseil de la défense a fait remarquer aux hauts magistrats militaires que Bazana est totalement absent dans ce procès. Car selon la loi, Bazana était supposé être vivant jusqu’au 31 mai 2011. Mais ce jugement est de novembre 2010. Donc, il y a eu entorse à la loi.

« Le ministère public nous a promis une orgie de preuves, mais il a été prodigue en supputations. Il y a eu absence de preuves, et la Cour doit tenir compte de cet aspect de choses », a-t-il aussi lancé à l’intention de la Cour.
Pour Me Bokata, l’objectif des parties civiles est d’amener ce procès au-delà des échéances électorales de 2016.

Il a dit à ce sujet : « Ce ne sont pas ceux qui sont en ce moment dans le box des accusés qui les intéressent, mais le général John Numbi, et plus loin le chef de l’Etat ». « Ils ont parlé de crime d’Etat, sont-ils sûrs qu’ils vont aboutir. Ces officines des droits de l’homme croient-elles maîtriser tout cela ? Il y a question d’un piège d’Etat », croit-il savoir.

Dans sa plaidoirie, Me Bokata a soutenu que ce sont des raisons politiques qui ont abouti à l’arrestation de son client et à la mise à l’écart du général John Numbi. « C’est ainsi que mon client vous dit qu’il est victime d’un montage ; il n’y a rien de plus dangereux que d’habiller un procès politique. La canonisation doit passer par un procès canonique », a-t-il insisté.

Après avoir fait allusion à la VSV qui avait touché 210.000 dollars à l’USAID en en 2007, Me Bokata a ironisé que le corps de Chebeya est un « cadavre exquis » ; et chacun a pu se servir sur ce cadavre. En cela, il a pointé du doigt les officines des droits de l’homme et les officines politiques.

« Si tout ce que nous avons eu à dire est rejeté, on aura posé le premier jalon de ce qu’on appelle crime d’Etat. On arrivera jusqu’au général John Numbi, et après ce sera le président Kabila ou un autre. Et l’organe de la loi est tombé dans le piège des parties civiles », a conclu Me Bokata.

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